Sortir de la solitude du dirigeant - image d'illustration générée sur Midjourney

La solitude du dirigeant : s’entourer pour mieux se développer

Près de la moitié des dirigeant·es de PME et d’ETI se sentent isolé·es₁. La solution ? (Bien) s’entourer.

Tous les jours, j’accompagne les dirigeant·es d’entreprise pour les aider à accélérer leur business. Et depuis la sortie de l’étude Bpi France en 2016, il y a bien une chose qui n’a pas changé : les dirigeant·es d’entreprises se sentent souvent seul·es, qu’ils construisent une start-up ou une TPE. D’ailleurs, trois dirigeants sur quatre aspirent à être mieux entourés1. Alors, par où commencer pour échapper à la solitude du dirigeant ?

Comprendre la solitude du dirigeant

Nobody knows how to be a CEO. It’s something you have to learn. It’s a very lonely job.

Ben Horowitz

Les origines de la solitude du dirigeant

Loin des soirées de levées de fonds de la start-up nation et des posts inspirationnels des CEO aux milliers de likes sur LinkedIn, il y a la réalité du quotidien. Et la solitude qui l’accompagne. Mais alors, pourquoi les dirigeants se sentent-ils seuls ? Tout d’abord, il y a une question culturelle : le patronat n’est pas toujours compris en France, et donc par l’entourage des entrepreneurs. On apparente le quotidien de tous les dirigeants à celui de Bernard Arnault, quand 21 % des entreprises se déclaraient en difficulté en 20192.

Être seul au sommet inclut un grand nombre de responsabilités : trouver des clients, rechercher la rentabilité (notamment grâce à un bon pricing), avoir de la trésorerie d’avance, insuffler une vision à ses équipes, créer une culture d’entreprise, assurer sa croissance malgré l’inflation… Et cette liste est bien évidemment loin d’être exhaustive. Derrière ce grand nombre de devoirs, il y a une autre réalité, assez pernicieuse. Le patron (ou la patronne) se sent fréquemment responsable de ce qu’il se passe dans sa boîte, s’attribuant les réussites comme les échecs. C’est normal, après tout, c’est lui qui est à la tête de l’entreprise. D’ailleurs, une étude montrerait qu’environ 15 à 20 % des résultats des entreprises peuvent être attribués aux PDG3.

Mais, ces dernières années, nous avons connu des événements qui ont marqué les entreprises, sans qu’aucun de nous ne puisse avoir le contrôle dessus (par contre, on se doit d’ajuster sa stratégie en fonction) : crise sanitaire puis inflation. D’ailleurs, en 2021, 77 % des dirigeants se déclaraient en bonne santé mentale, alors même que la moitié se disait plus stressée4. Paradoxal, non ? La même étude nous apprend que la moitié d’entre eux déclare avoir l’impression de ne jamais pouvoir décrocher de son travail.

Quand nous sommes seul·es à la barre du navire, nous pouvons vite avoir l’impression que tout repose sur nous, qu’il faut rester fort et qu’être fort, ce n’est pas demander de l’aide. Un mélange entre l’obligation de faire bonne figure et de la méthode Coué, “Je vais bien, tout va bien”.

Les causes de la solitude du dirigeant 

Qu’est-ce qui concrètement déclenche la solitude du dirigeant ? La BPI identifie dix facteurs :

  • le stress lié à la trésorerie ;
  • le déficit de compétences internes ;
  • le fait de devoir dissimuler ses émotions ;
  • la gestion de relations difficiles avec les salariés ;
  • le manque de soutien et de relais dans l’entreprise ;
  • le poids des responsabilités et l’exercice du pouvoir ; 
  • la difficulté à concilier vie professionnelle et vie privée ;
  • l’incertitude et la complexité croissantes de l’environnement ;
  • la difficulté à recruter et à trouver des compétences clé pour l’entreprise ;
  • le manque de reconnaissance sociale et les préjugés à l’égard des dirigeants.

Heureusement, il existe une solution pour lutter contre la solitude, tout en mettant toutes les chances de votre côté pour une croissance d’entreprise pérenne : s’entourer des bonnes personnes.

S’entourer pour sortir de l’isolement

Great things in business are never done by one person, they’re done by a team of people

Steve Job

Les raisons de chercher des soutiens externes

C’est simple : vous ne pouvez pas être au four et au moulin. C’est impossible d’avoir les mille compétences nécessaires au bon fonctionnement d’une entreprise. C’est d’ailleurs pourquoi vous embauchez une équipe pour vous seconder. Recruter une équipe meilleure à son job que vous, c’est bien. Néanmoins, ça ne suffit pas.

Vous devez tout de même être en mesure de piloter ces fonctions et de savoir poser les bonnes questions aux experts embauchés pour vérifier que tout roule. Et ce, nonobstant la traction de votre start-up, votre business actuel et votre maturité entrepreneuriale.  

En plus de son équipe opérationnelle et fonctionnelle, un entrepreneur sachant entreprendre sait s’entourer des bons soutiens.

Le soutien indispensable : l’expert-comptable 

Cash is King. D’ailleurs, 38 % des start-ups échoueraient parce qu’elles ont manqué de fonds et n’ont pas réussi à faire une nouvelle levée5. Dans ces conditions, faire appel à un expert-comptable n’est pas une option, mais une obligation. Lui seul vous permettra de ne pas faire d’erreurs de gestion et d’avoir les bons outils pour piloter votre trésorerie. On voit beaucoup d’experts-comptables digitaux : attention à payer peu cher un service moyen. 

Tant que vous êtes seul, ça passe encore. C’est d’ailleurs un service très adapté au solopreneuriat. Bien qu’une fois encore, je recommande de faire appel à un expert (même ponctuellement) passé un certain seuil de revenus/de croissance pour être certain de faire les choix les plus intelligents.

Un expert-comptable vous accompagne :

  • sur la paie ;
  • sur la fiscalité ;
  • sur la comptabilité ;
  • sur le contrôle financier ;
  • sur la gestion des dépenses ;
  • sur la prise de décisions (investissement, demande de financement, etc.).

Dans tous les cas, dès que l’entreprise a des revenus récurrents, des salariés, des délais de paiement un peu longs qui requièrent de la trésorerie… Il est essentiel de passer à un vrai expert-comptable, qui répond au téléphone – et à vos questions. 

Honnêtement, dès la création de l’entreprise, c’est une dépense nécessaire : il peut vous aider à choisir le meilleur statut en fonction de vos objectifs et de votre apport. Ok, faire appel à un expert-comptable n’est pas une obligation légale. Les dirigeants se disent souvent que c’est l’occasion de faire une économie. Cependant, croyez-moi : ce que vous perdez en honoraires, vous le gagnerez 100 fois en sommeil.

Les soutiens utiles pour les dirigeant·es

Le commercial

Souvent, l’entrepreneur·e est le premier — et le seul — commercial de son entreprise. Si c’est son métier ou son expertise originelle, parfait. Trop souvent, ce n’est pas le cas. Non seulement ça empêche l’entrepreneur de faire ce pour quoi il est doué, mais ça plante des deals qui auraient pu éclore avec la bonne personne en face. Bref, c’est une perte de cash. Et encore une fois : cash is king.

La fausse bonne idée ? Prendre un alternant “Biz Dev” en pensant qu’il va closer les deals que vous n’arrivez pas à faire entrer. Un alternant est là pour apprendre, donc vous pouvez lui déléguer ce que vous maîtrisez si vous l’accompagnez. Et si vous ne savez pas faire du tout ? Prenez un commercial freelance. Si vous préférez maîtriser cet aspect, vous pouvez aussi vous former au commercial. Tout en gardant en tête que vous ne pouvez pas être au four et au moulin. Si vous gérez la partie commerce, vous devrez en déléguer d’autres.

Le commercial va aller chercher de nouveaux deals, mais il est aussi le garant de son portefeuille client. Il est essentiel de prendre le temps de le bichonner, pour favoriser la rétention client.

Le coach en développement personnel

C’est comme le masque à oxygène dans les avions. Si vous n’allez pas bien, la boîte ne peut pas aller bien. Idéalement, faites appel à un coach avant qu’il ne soit trop tard et que le masque tombe dans l’avion : si une personne de confiance vous le suggère, c’est déjà presque le cas.

Travailler avec un coach en développement personnel va vous aider à travailler sur votre propre lucidité sur soi, sur l’écoute du feedback des autres (collaborateurs, associés, autres prestas, voire les proches), mais aussi et surtout la capacité à faire ce qu’il faut pour lever vos points de blocage. Nous en avons tous : syndrome de l’imposteur, frustrations, rapport à l’argent ou à l’échec…

Rappelez-vous que dans les dix facteurs déclencheurs de sentiment de solitude pour les dirigeants, il y a le fait de devoir dissimuler ses émotions, le poids des responsabilités et l’exercice du pouvoir, la difficulté à concilier vie pro/vie perso et le manque de reconnaissance sociale et les préjugés à l’égard des dirigeants. Ce sont autant de points que vous pouvez travailler avec un coach.

Le CFO à temps partagé

Si l’entreprise croît et prévoit de lever (dette ou equity), un bon expert-comptable ne suffit plus. Préparer les tableaux de trésorerie, mettre à jour des plans financiers prévisionnels, proposer des améliorations de burn-rate ou alerter sur des difficultés à atteindre des objectifs, c’est plutôt le job d’un CFO (ou directeur financier en français). Contrairement aux idées reçues, on trouve de plus en plus d’indépendants sur ce créneau. Mon conseil si vous choisissez un CFO externe : prenez un ou une senior, ayant déjà eu le job en interne à temps plein, et uniquement sur recommandation. 

Oui, le CFO peut être le bras droit du dirigeant, même s’il est freelance. Je vous recommande particulièrement de faire appel à ce pro de la finance avant de lever ou d’emprunter, ou si vos sources de revenus se diversifient fortement.

Les soutiens ponctuels

Les avocats

Je mets cette fonction au pluriel, car vos conseils juridiques seront de nature différente selon vos besoins et la maturité de votre business. Généralement, on commence avec un avocat expert en droit commercial pour les CGV classiques d’un site ou un avocat spécialisé dans la création d’entreprise. Ensuite, on peut avoir besoin d’un expert en rédaction des contrats (les templates gratuits dénichés sur Google, ça manque de subtilité et ça ne vous protège souvent pas longtemps), en actes commerciaux, en relation entre actionnaires ou encore, en litige.

Le Sparring Partner

Ou la Sparring Partner, évidemment. Non, ce n’est ni un coach business, ni un consultant. C’est un soutien qui accompagne les dirigeants sur toutes leurs problématiques, du diagnostic à l’exécution. 

Un Sparring Partner, c’est quelqu’un qui écoute d’abord et avant tout. Vos envies, vos ambitions, vos doutes, vos objectifs, vos contraintes, votre raison d’être, vos questions actuelles et à venir… Comme dans la maïeutique, parler vous aide à clarifier vos idées.

Un Sparring Partner, c’est quelqu’un qui pose les questions que vous passez sous silence. Il vous invite à réfléchir à des sujets en dehors de votre radar immédiat. Il vous oblige à prendre de la hauteur. Sans peur de poser les questions qui fâchent ou d’aborder un sujet sensible.

Un Sparring Partner, c’est quelqu’un qui ne vous impose pas une méthode, une tactique, un modèle. Il vous apporte son expertise, son réseau, sa veille, mais en adaptant, mixant, simplifiant pour que ce soit directement applicable à votre situation de façon pragmatique. En résumé : moins de slides, plus d’actions.

Un Sparring Partner, c’est quelqu’un qui ne tient pas le stylo, mais qui apprend à vos équipes à le faire. Vous connaissez la rengaine : donnez un poisson à un homme, il mangera un jour. Apprenez-lui à pêcher, il mangera toujours.

Un Sparring Partner, c’est quelqu’un qui construit avec vous le chemin pour arriver à la destination. C’est quelqu’un qui propose de le réinventer en cours de route selon les résultats et les contraintes. C’est quelqu’un qui propose des détours nécessaires ou des étapes utiles, mais vers la destination, toujours.

Un Sparring Partner, ce n’est pas quelqu’un qui vous a dit que. C’est une personne qui agit en véritable caisse de résonance, entre stratégie et exécution, avec un seul objectif : vous accompagner dans le développement de votre entreprise.

On en parle ?

Crédits : 
Graphique : Création Canva
Illustration Midjourney : Prompt/a business woman on top of a donjon, view from behind –ar 3:2  + vary strong + Zoom out x1.5

Sources 
1 – Étude BPI France Le Lab
2 – Étude de l’INSEE
3 – Étude citée dans Harvard Business Review France
4 – Baromètre Malakoff Humanis
5 – CB Insights

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